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(nouveau)Parti Communiste Italien
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Sommaire

 

La Huitième Ligne de Démarcation


Index de la seconde partie : 

1. La guerre populaire révolutionnaire de longue durée.
Nous, les communistes des pays impérialistes, quelle voie devons nous suivre pour porter la classe ouvrière à instaurer la dictature du prolétariat et commencer la phase socialiste de transformation de la société capitaliste et pour ainsi contribuer à la seconde grande vague de la révolution prolétarienne mondiale ?

2. Les révolutions de ‘nouvelle démocratie’.
La stratégie des communistes dans les pays coloniaux et semi-coloniaux opprimés par l'impérialisme.

3. La lutte de classe dans la société socialiste.
La contribution historique des pays socialistes construits pendant la première grande vague de la révolution prolétarienne et les enseignements de leur expérience.

4. La ligne de masse.
La ligne de masse comme la méthode principale de travail et de direction de tout parti communiste.

5. La lutte entre les deux lignes dans le parti.
La lutte entre les deux lignes dans le parti comme principe pour le développement du Parti Communiste et pour sa défense face à l'influence de la bourgeoisie.

Notes


1. La guerre populaire révolutionnaire de longue durée.

 

Nous, les communistes des pays impérialistes, quelle voie devons nous suivre pour porter la classe ouvrière à instaurer la dictature du prolétariat et commencer la phase socialiste de transformation de la société capitaliste et pour ainsi contribuer à la seconde grande vague de la révolution prolétarienne mondiale ?

 

Il y a des forces subjectives de la révolution socialiste (FSRS) qui ne dépassent pas le stade d'une approche spontanée des luttes. Elles participent aux luttes existantes et elles font “ce qu’on peut faire”. Elles essayent de renforcer toutes sorte de luttes. Elles ont confiance que de lutte en lutte elles arriveront à gagner, si seulement le nombre de luttes augmente et si aussi le nombre des travailleurs qui y participent augmente, si les luttes deviennent plus acharnées (si elles deviennent plus “militantes”).

Les forces qui dépassent cette approche spontanéiste, (5) se posent le problème de trouver la voie de la conquête du pouvoir. Elles se posent le problème de la stratégie à suivre pour la conquête du pouvoir. Quelle est “la voie à suivre” pour arriver a instaurer la dictature du prolétariat ? Quel est le dessein général duquel découle la stratégie à suivre dans chacune des phases à travers lesquelles nous devrons forcément passer ? Quelle est la conception générale sur laquelle on doit baser nos plans à long terme, projeter toutes nos opérations, distinguer les initiatives qui nous conviennent de celles qui ne nous conviennent pas, comprendre quelles sont les classes et les forces politiques et sociales sur lesquelles dans chaque phase nous pouvons compter et dans quelle limite nous pouvons compter sur chacune d’elles, comment employer de la manière la plus opportune les forces organisées que nous dirigeons déjà ?

Avoir une stratégie juste, ça veut dire donner une juste réponse à cette question qui préoccupe ceux qui aujourd’hui sont déjà convaincus que la classe ouvrière, pour résoudre ses milles problèmes, doit conquérir le pouvoir et instaurer la dictature du prolétariat : qu’est ce qu’ils doivent faire pour se rapprocher de la victoire et pour mener d'étape en étape la classe ouvrière à créer les conditions nécessaires pour profiter de l’actuelle crise générale du capitalisme, pour instaurer son pouvoir et pour inaugurer la nouvelle époque de transformation de la société, l'époque socialiste? Se donner une stratégie veut aussi dire apporter une réponse fondée sur l'expérience et la science du mouvement communiste et non seulement une réponse spontanée, instinctive ou de bon sens, à “la voie démocratique et parlementaire au socialisme”, à  “la voie des réformes de structures”, à “l’évolution pacifique vers le socialisme”, à “la convergence graduelle entre les deux systèmes” et aux autres “voies” dont les révisionnistes ont été les promoteurs dans les pays impérialistes et qui ont désormais montré, dans les 15 dernières années aussi dans la pratique, leur caractère utopique.

Pour les spontanéistes, la fréquence et l'intensité des luttes, la quantité de travailleurs qui y participent et l'acharnement avec laquelle ils y participent et, surtout, l'efficacité des luttes, sont des données desquelles il faut partir. Au contraire,  à toutes les personnes qui réfléchissent sur le sujet, il est clair que, à égalité d'autres conditions, en effet toutes ces choses là dépendent de la direction que nous, les communistes, nous donnons à nos activités et de la voie que nous suivons. Souvent, tout camarade à vécu des situations dans lesquelles beaucoup de travailleurs auraient voulu agir, mais ils ne savent pas que faire, ou bien si ils ont une idée de quoi faire, concrètement ils n'ont pas les moyens pour le faire parce qu’ils ne les ont pas construits préalablement, et/ou ils ne sont pas dans les conditions de le faire parce qu'ils n’ont pas créé préalablement ces conditions. Le niveau de mobilisation des masses populaires qu’il y a effectivement face à un événement, n'est pas le fruit spontané ni au hasard de la somme de volontés individuelles. Il n’est pas non plus le fruit des relations spontanément établies dans les masses populaires par le rôle qu'elles jouent dans la société bourgeoise. La conscience qui se forme dans les masses populaires face à un événement n’est pas non plus le fruit spontané ou au hasard de la sommes des expériences individuelles. Les deux sont le fruit des conditions créées par la lutte politique et par le mouvement politique qui ont précédé l’évènement. Nous, les communistes, nous pouvons modifier, en suivant une ligne approprié, la fréquence et le nombre de luttes, le nombre de travailleurs qui y participent, leurs détermination et leur acharnement et les caractéristiques de ces luttes. A condition d’avoir créé préalablement les conditions suivantes : si nous avons créé un réseau d'organisation et des canaux de relations et d’ententes, si nous avons créé opportunément une orientation juste, si nous avons d'une manière adéquate préparé les luttes, si nous avons déclenché les luttes justes au moment opportun, si nous avons obtenu des victoires. Pour gagner il est indispensable d'avoir et de suivre une stratégie juste, c'est-à-dire conforme aux conditions concrètes dans lesquelles nous luttons, aux conditions desquelles nous partons et qui ne dépendent pas de notre volonté et de notre intelligence, que nous ne pouvons pas changer avec notre activité ou bien que nous pouvons changer seulement en menant pendant un certain temps une activité proportionnée.

Nous, les communistes, nous sommes en train de reconstruire le parti communiste dans une phase d'instabilité et de bouleversement de l'ordre existant (que nous appelons “situation révolutionnaire en développement”). Cette phase se prolongera encore pour beaucoup d'années quelles que soient les initiatives d'individus, groupes et partis. Il est donc indispensable que nous définissions, bien qu’en termes généraux et schématiques, la voie que nous devons suivre dans les prochaines années, à partir de maintenant et jusqu'au moment où nous aurons instauré la dictature du prolétariat : c’est à dire notre stratégie. Une FSRS ( force subjective de la révolution socialiste ) qui ne s'occupe pas de tracer la stratégie, même si elle déclare travailler à la reconstruction du parti communiste, ou elle est hors du bon chemin ou de toute façon elle ne donne qu’une contribution limitée.

A partir de la publication du Manifeste du Parti Communiste (1848), les communistes se sont posés la tâche de tracer la voie qu’ils devaient suivre, la direction générale à laquelle ils devaient se conformer pour accomplir le devoir de mener la classe ouvrière à instaurer son pouvoir.

En 1848 et quelques année après les communistes ont entretenu l’illusion que le prolétariat prendrait le pouvoir au cours d'une révolution populaire, de la même manière que l'avait conquis la bourgeoisie contre les forces féodales. Par sa nature la société bourgeoise est perpétuellement le terrain d’innombrables luttes d'intérêts entre classes, groupes et individus. De temps en temps ces luttes “entrent en résonance”, elles s'aggravent, elles se coalisent jusqu'à diviser la société en deux camps opposés et elles explosent dans un conflit qui implique la société entière. “Il aurait succédé qu'une minorité, constituée par un parti prolétarien capable de se mettre à la tête du mouvement et d’exprimer d’une manière cohérente les exigences économiques, politiques et culturelles du prolétariat et de la majorité de la population, aurait été au même, en luttant contre la minorité bourgeoise qui avait participé alliée au peuple dans la première phase de la révolution, de guider la majorité du peuple à la victoire contre la bourgeoisie”. (6) 

En 1895 Engels reconnut que “l'histoire avait démenti cette conception partagée par lui même et par Marx. Elle avait fait comprendre que la classe ouvrière, pour qu’elle puisse renverser la société bourgeoise, devait, au moins jusqu’à un certain point, avoir déjà élaboré les instruments et les conditions de son pouvoir à l'intérieur de la société bourgeoise même.”

Dans l'écrit auquel ici on fait référence (F. Engels, Introduction à Luttes de classes en France de 1848 à 1850 de K. Marx, 1895), Engels expliquait que la révolution socialiste se distingue de toutes les révolutions qui l'ont précédée dans l'histoire. Toutes les révolutions étaient restées révolutions de minorités, même quand le gros de la population y prenait une part active. Il s'était toujours agi de la substitution de la domination d'une classe exploiteuse par celle d'une autre. Une minorité dominante était renversée et une autre minorité prenait sa place. Par sa nature la révolution socialiste par contre n’exige pas seulement la participation active du gros de la population au renversement du vieux pouvoir. Elle exige aussi sa participation active à la création du nouveau pouvoir et à la transformation sociale à laquelle ceci préside. En outre entre la masse des travailleurs et n’importe quelle minorité exploiteuse il y a une différence qualitative qui n'existe pas entre l'un et l'autre minorité exploiteuse. L'accès de la masse des travailleurs au pouvoir ressemble encore moins par sa nature à la succession d'un parti bourgeois à un autre dans la direction de l’Etat. Le nouveau pouvoir ne peut pas consister dans la prise de possession de l’appareil d’Etat et de ses institutions, à l’activité desquels il faudrait seulement donner une orientation différente et des nouvelles lois. Il est nécessaire de détruire entièrement le vieil appareil d’Etat, ses institutions et son ordre et de les remplacer par un nouvel Etat adapté à la nouvelle classe dominante et à ses objectifs, avec ses propres institutions et ses propres ordres. Cela comporte donc une préparation du gros de la population à la hauteur de la nouvelle tâche, une accumulation des forces révolutionnaires qui doit se réaliser pas après, mais avant la conquête du pouvoir, dans le cadre de la société actuelle, tant que le pouvoir reste dans les mains de la bourgeoisie. Une partie de ce travail avait été déjà accompli, disait Engels en 1895. Dans les plus grands pays capitalistes d'Europe, Lénine reconnaissait vingt ans après, “dans le dernier tiers du XIX-ième siècle et au début du  XX-ième siècle, dans la longue période ‘pacifique' de l'esclavage capitaliste le plus cruel et dans une phase du progrès capitaliste le plus rapide, la Seconde Internationale a accompli sa part de travail préparatoire utile, d'organisation des masses prolétariennes” (Lénine, La Situation et les tâches de l’Internationale Socialiste, le 1er novembre 1914). Dans plusieurs pays européens la Seconde Internationale avait amené des millions de prolétaires à se coaliser dans des partis, à se proposer des objectifs communs et à exercer en tant que collectif et grâce à leur nombre, les mêmes droits politiques que la bourgeoisie  prétendait reconnaître à chaque individu (mâle), mais qu'aucun prolétaire, à cause de sa condition économique et sociale, ne pouvait exercer individuellement. Le parti prolétaire était arrivé à bénéficier de ces droits. Il exerçait sur la vie politique du pays l’influence que chaque bourgeois pouvait exercer individuellement grâce à ses richesses et grâce à son rôle dans la société civile. Déjà en 1895, Engels affirmait cependant que la bourgeoisie des pays européens aurait violé même sa propre légalité, comme les événements dans le siècle qui a suivie l’ont abondamment confirmé. Il annonçait le passage du système politique bourgeois de la démocratie bourgeoise à la contre-révolution préventive, et de la part du parti communiste, une accumulation des forces révolutionnaires qui ne se serait pas principalement obtenue dans les luttes électorales et parlementaires, ni en général dans le cadre des ordres existants.

 Il était donc non seulement impossible que la classe ouvrière instaurât son pouvoir de manière analogue à la prise du pouvoir de la bourgeoisie. Il était aussi hors de question de miser sur une conquête du pouvoir par voie électorale et parlementaire. Il était aussi hors de question de croire d’accomplir les tâches, que la classe ouvrière et les masses populaire devait accomplir, avec l’agrégation, l’organisation et l’unification idéologique et politique qu’elles  réalisaient autour des luttes parlementaires et des luttes quotidiens d'intérêts tout à fait naturelles et physiologiques pour la société bourgeoise ; avec ces même agrégations, organisations et unifications liées à ces luttes et qui portaient à la formation de partis électoraux, de syndicats, de coopératives et d’autres organisations de masse. Pourtant Engels ne disait pas comment le parti communiste aurait dû répondre à cette transformation du régime politique de la bourgeoisie qui aurait mis hors-jeu la manière avec laquelle il avait jusqu'à ce moment opéré pour accumuler les forces révolutionnaires au sein de la société bourgeoise. (7) A son tour dans l'article déjà cité ci-dessus, Lénine ajoutait que “le devoir appartient à l'Internationale Communiste d'organiser les forces du prolétariat pour l'assaut révolutionnaire contre les gouvernements capitalistes, par la guerre civile contre la bourgeoisie de tous les pays, pour le pouvoir politique, pour la victoire du socialisme!”. Il ne disait pas comment la nouvelle Internationale aurait réalisé cette tâche.

La première Internationale Communiste (Comintern 1919-1943, ndt) n’a pas porté à l'instauration de la dictature du prolétariat en Europe (occidentale, ndt). Mais, au cours de la longue crise qui pendant la première moitié du dernier siècle a bouleversé le continent, elle a beaucoup avancé vers ce but. Les conceptions et les méthodes avec lesquelles l'IC a cherché à canaliser les événements de cette période, et a engagé dans la lutte les forces dont elle disposait, et les résultats de son activité constituent un matériel expérimental précieux. Nous les communistes nous devons l'utiliser pour élaborer les conceptions et définir les méthodes et les critères avec lesquels nous affrontons à notre tour la même tâche au cours de la nouvelle crise générale qui déjà depuis plus de trente ans secoue nos pays, qui remet en cause l’ordre de chaque pays et l’ordre internationale et qui élimine l’une après l'autre les conquêtes que les masses populaires de nos pays avaient arraché à la bourgeoisie. En bref, nous devons utiliser l'expérience de la première IC pour élaborer notre stratégie qui vise à instaurer la dictature du prolétariat. (8)

Le bilan des expériences de la première IC amène certains camarades à des conclusions qui, bien que différentes l’une de l’autre, non seulement n’éclaircissent pas les événements ni orientent et stimulent le travail que nous devons faire, mais dans des différentes mesures entravent soit la compréhension, soit le travail pratique, et démoralisent nos forces. Toutes ces conclusions sous-estiment les potentialités révolutionnaires de la classe ouvrière et des masses populaires des pays impérialistes. Ces camarades ne veulent pas reconnaître que les conceptions et les méthodes de la première IC étaient inadéquates à l'objectif qu’elle poursuivait. Ils doivent donc se replier sur la thèse que la classe ouvrière des pays impérialiste ne veut pas le socialisme,  ou bien sur la thèse que l'instauration du socialisme dans les pays impérialistes n’est pas possible, ou au moins sur la thèse qu’il n’y a rien à faire sauf espérer dans le mouvement révolutionnaire des pays opprimés ou dans la chance. En générale il s'agit de bilans empiristes. (9) Au contraire si on base son bilan sur les faits analysé à la lumière du matérialisme dialectique, on arrive à la conclusion qu’aussi dans les pays impérialistes la voie de la conquête du pouvoir de la part de la classe ouvrière, la forme de la révolution socialiste, c’est la guerre populaire révolutionnaire de longue durée. (10)

Contrairement à la Seconde Internationale (1889-1914, ndt), l'IC (Troisième Internationale, ndr) a tenu compte dans sa pratique de la différence qualitative entre les luttes d'intérêts (congénitales à la société bourgeoise et quotidiennes) et la lutte pour le socialisme. Cependant elle a constamment opposé, comme éléments dont l'un exclut l’autre, lutte pacifique et lutte violente, travail à l'intérieur de la société bourgeoise et travail contre la société bourgeoise, activité parlementaire et guerre civile, alliance et lutte, contradictions non antagonistes et contradictions antagonistes, contradictions entre masses populaires et bourgeoisie impérialiste et contradictions entre groupes de la classe dominante, politique revendicative et politique révolutionnaire, organisation légale et organisation clandestine. Au contraire, en réalité, ces éléments constituent des unités de contraires. La stratégie de la guerre populaire révolutionnaire de longue durée reconnaît ces unités de contraires. Elle développe les deux pôles de l’unité et elle compose avec eux la lutte de la classe ouvrière pour miner et en définitive éliminer le pouvoir de la bourgeoisie impérialiste et instaurer son pouvoir. Les conflits quotidiens (structuraux, physiologiques) de la société impérialiste opposent les membres des masses populaires (comme individus, comme collectif de travail, comme catégorie, comme classe) à la bourgeoisie impérialiste. Mais, à eux seuls, il ne les unissent pas de manière permanente dans un front antagoniste à la société bourgeoise. Parce qu'en même temps, tant qu'elle l'implique en conflits répétés et quotidiens avec le capitalisme et son Etat, la société bourgeoise soumet tout membre des masses populaires à la direction et à l'influence idéologique et morale de la bourgeoisie. Elle émousse  et érode le côté antagoniste que, de l’autre côté, elle crée et recrée continuellement.

Alors il s'agit pour le parti communiste de recueillir et consolider en organisations spéciales le côté antagoniste que la société bourgeoise implique en elle même et qui continuellement émerge d’elle. Il s'agit de recueillir et unir en organisations tout antagonisme que la société bourgeoise engendre continuellement, d’éduquer à l'antagonisme tous ceux que l'expérience a porté à prendre des voies antagonistes, de renforcer leur antagonisme avec la force de l'organisation et de l'action, de faire en sorte que ce côté antagoniste exerce son influence sur toute la société tout en étant extérieur et opposé à elle. En bref, dans tout pays impérialiste le parti communiste doit se donner la tâche de promouvoir, d’organiser et de diriger la guerre des masses populaires contre la bourgeoisie impérialiste. Mais il ne s'agit pas pour les partis communistes de déclarer une guerre qui n'existe pas. Il s'agit au contraire, de la part des partis communistes, de prendre conscience de la guerre non déclarée qui se déroule déjà et de porter par étapes les masses populaires à la mener, elles aussi, de manière de plus en plus efficace.

La deuxième crise générale du capitalisme et la situation révolutionnaire en développement correspondante sont le contexte de la désagrégation de la société actuelle et de la lutte pour l'affirmation de la société socialiste dans les pays impérialistes. La bourgeoisie impérialiste pour valoriser son capital mène aujourd'hui déjà, aussi contre les masses populaires des pays impérialistes, une guerre non déclarée par laquelle elle les écrase, et de manière différente elle torture physiquement et spirituellement une grande partie de la population des pays impérialistes. Elle même détruit les ordres et les pratiques dans lequel la sujétion des masses populaires des pays impérialistes à la bourgeoisie était devenue une habitude. Le sommet des groupes impérialistes américains a donné, à partir de l’été passé (2001, ndt) aux événements une tournure qui confirme d’une manière encore plus claire que la cible principale des groupes impérialistes sont les masses populaires des pays impérialistes. Il est clair du reste que, tant qu’ils réussiront à tenir en respect les masses des pays impérialistes, ils réussirons aussi à tenir en respect les peuples des pays opprimés : en les divisant, en les opposant l'un à l'autre, en bombardant les irréductibles et en terrorisant. D'autre part les groupes impérialistes peuvent faire le gendarme mondial seulement s’ils instaurent dans les pays impérialistes des Etats toujours plus policiers et une mobilisation réactionnaire croissante des masses. Voila le processus de la crise générale du capitalisme. Il se développe avec une variété extraordinaire de formes et avec des changements fréquents. Il procède avec des hauts et des bas, d’une manière très irrégulière et différenciée. Des périodes dans lesquelles l'oppression frappe de manière particulièrement cruelle, alternent avec des périodes presque de trêve. Des périodes dans lesquelles l'oppression frappe les secteurs le plus large des masses populaires, alternent avec des périodes dans lesquelles les pires coups sont concentrés sur des secteurs restreints. La bourgeoisie alterne les différents formes d’attaques sur les différents groupes des masses populaires. Actuellement face à cette guerre, chaque individu, groupe, catégorie et classe des masses populaires réagit en ordre éparpillé du mieux qu’il peut. La bourgeoisie dispose de moyens différents pour diviser, pour frapper un groupe après l'autre, pour entraver la concentration des classes et des groupes frappés, pour les mettre l'un contre l'autre. Mais c'est un processus qui continuera tant que la crise générale actuelle n'aura pas débouché dans la révolution socialiste ou dans une nouvelle guerre inter-impérialiste qui établira un nouvel ordre mondial capitaliste (une débouché que nous ne pouvons pas exclure avec certitude). Il s’agit donc pour tout parti communiste de transformer par étapes cette guerre non déclarée que les masses subissent, en une guerre que les masses populaires mènent en forme de plus en plus organisée, de plus en plus unifiée et en prenant de plus en plus en main l'initiative. L'expérience de la Résistance contre le nazi-fascisme en Italie et en France montre qu'aussi dans les pays impérialistes plus développés la guerre révolutionnaire est possible : tout dépend de combien les masses populaires y participent. Tout parti communiste doit comprendre d’une manière toujours plus profonde la guerre non  déclarée qui se déroule, recueillir les formes de résistance que les masses lui opposent, les élaborer, les socialiser et les porter à un niveau supérieur. Combiner toutes les formes de luttes que les masses pratiquent, pacifiques et violentes, ouvertes et clandestines. Trouver les manières de faire de plus en plus confluer tous les groupes, les catégories et les classes des masses populaires dans un front unique qui s'oppose au camp de la bourgeoisie impérialiste. Evidemment tout parti devra apprendre à appliquer dans son terrain particulier les thèses générales . Cela sera certainement un processus très long, tortueux et douloureux. Il devra faire un effort constant pour tirer les enseignements général des faits particuliers, en s’appuyant sur les données particulieres d’autant plus que la situation politique est arriérée. La stratégie de la guerre populaire révolutionnaire de longue durée est une stratégie pour la transformation de la classe ouvrière en classe dirigeante, pour faire passer les masses populaires de la direction de la bourgeoisie à la direction de la classe ouvrière et pour instaurer la dictature du prolétariat en balayant la dictature de la bourgeoisie. La guerre populaire révolutionnaire est une guerre de type spécial, différente de celles qu’on a vu jusqu'à présent. La classe ouvrière la mènera à sa manière. À l'intérieur de cette guerre l'aspect militaire est essentiel, mais l'importance de son rôle changera beaucoup d'étape en étape. Seulement le développement pratique nous permettra de mieux définir tour à tour les tâches à accomplir. En termes générales dès à présent on peut dire que pour tout parti il s’agira :

1. de déterminer les phases pour arriver à l'instauration de la dictature du prolétariat, de découvrir pour chaque phase les objectifs et les lignes justes (c'est-à-dire conformes au développement objectif des contradictions du monde actuel et du pays spécifique) et de s'organiser de manière adéquate pour les réaliser;

2. de mobiliser toute classe et groupe des masses populaires à défendre avec la plus grande efficacité possible tout son intérêt particulier contre la bourgeoisie impérialiste et à exploiter de toutes manières les luttes quotidiennes d'intérêts qui se déroulent dans la société bourgeoise et dans ses institutions, comme un facteur auxiliaire du développement du processus révolutionnaire. (11)

3. d’amener la classe ouvrière à s’identifier avec son avantgarde organisée et à agir en conformité aux lignes et aux objectifs indiqués par le parti et à prendre la direction des autres classes des masses populaires; (12)

4. de diriger et de manœuvrer en toutes circonstances les couches le plus avancées des masses de façon à ouvrir la voie de la lutte aux couches  les plus arriérées qui peuvent se radicaliser seulement si elles donnent une expression pratique à la tendance anticapitaliste, dictée par l'expérience pratique de l'oppression et de l’exploitation ; (13)

5. de construire et diriger (directement ou indirectement) en dehors des relations politiques bourgeoise (donc le parti est nécessairement illégal) le front le plus ample possible de classes et de forces politiques pour réaliser les objectifs de chaque phase en promouvant le maximum d’organisation de masses publiques et clandestines, légales  et illégales, pacifiques et combattantes ;

6. de développer très attentivement les forces armées révolutionnaires dirigées par le parti parce qu'en définitive la lutte armée doit jouer un rôle décisif et déterminant pour réaliser les aspirations des masses populaires et instaurer la dictature du prolétariat (“le pouvoir est au bout du fusil”).

En conclusion il s'agit de développer tout le potentiel de la guerre populaire révolutionnaire de longue durée, en construisant un large front de forces et de classes révolutionnaires autour du parti, qui a avec toute composante du front une relation d'unité et de lutte. (14)

Mao Tse-tung a élaboré l'expérience de la révolution russe et de la révolution chinoise jusque à en tirer la théorie la plus avancée de la guerre populaire révolutionnaire de longue durée. Il a développé de manière systématique la science de cette guerre populaire révolutionnaire de long durée. Elle est la théorie la plus développée de la forme de la révolution prolétarienne, de la voie que la classe ouvrière doit tenir aussi dans les pays impérialistes pour prendre le pouvoir. Elle éclaire en outre et elle clarifie l'expérience de la première Internationale Communiste dont les passages et les résultats sans cette théorie restent mystérieux, tandis qu'à la lumière de cette théorie ils deviennent hautement instructifs.

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